Sunday, December 29, 2013

The Man from Earth

The Man from Earth (Richard Schenkman, 2007, USA)


John Oldman, professeur universitaire, décide de partir vers une destination inconnue en laissant tout derrière. Il invite ses amis avant de le faire pour leur expliquer ses raisons : c'est un homme qui ne vieillit pas et qui a 14 000 ans d'existence.

Le concept de l'immortalité pour l'être humain a toujours été une source d'inspiration inépuisable. Les mythes et légendes sur des hommes qui ne vieillissent pas existent partout. Chaque peuple a sa propre version des choses, celle des vampires étant probablement la plus connue. Et comme c'est souvent le cas avec les vampires, ces êtres immortels ont souvent des pouvoirs surnaturels ou inhumains. Ils sont également mal vus, en général, puisqu'ils ne peuvent pas cohabiter avec les humains normaux sans leur causer des dégâts, qu'ils soient directs ou collatéraux. D'un autre point de vue, c'est comme si on s'opposait à Dieu et à sa volonté en étant immortel. Après tout, si un homme a la possibilité d'assister en temps réel à la création de toutes les religions majeures du monde, il est tout à fait normal d'y voir un ennemi de la religion. En gros il serait le seul témoin direct sur cet énorme mensonge qu'est la religion ou Dieu, tel décrit dans ces religions répandues partout.
Mais qu'en est-il si un homme qui ne vieillit pas n'a ni super pouvoirs, ni intention de nuire aux autres, et qui ne chercherait qu'à mener sa vie en paix pour encore des milliers d'années ?

L'enjeu est énorme mais c'est une réussite. The Man From Earth nous offre la chance de vivre, pendant un temps déterminé, une sorte de vérité parallèle. Que se passerait-il si un jour l'un de nous est confronté à une situation pareille ? Il va certainement poser des questions, tout d'abord sur l'histoire et l'état du monde à l'époque, puis sur le mode de vie de John, sur son histoire à lui, sur ce qu'il a vu de ses propres yeux, ou tout simplement sur des petits détails insignifiants, mais pour lesquels John a toujours une réponse toute prête. En essayant de convaincre ses amis par son histoire, et seulement à travers ses paroles, John se trouve face à un obstacle majeur : la foi, et pas seulement religieuse. Si quelqu'un est convaincu jusqu'au fin fond de son être de quelque chose, il lui est impossible de cesser d'y croire en un seul coup. Sa réaction peut même être violente. Il pourra carrément refuser la simple écoute. Les normes disent que ce qui s'entend, peu importe la solidité de la logique derrière ou l'absence de mauvais arguments, est faux tant qu'il ne s'accorde pas avec ce qui nous sied. Que dire alors s'il s'agit de donner l'explication derrière l'origine des religions, le christianisme étant directement pointé du doigt !

Mais peut-être que John Oldman est seulement en train de mentir ? Peut-être que c'est juste un homme très intelligent qui sait comment ficeler un mensonge parfait en peu de temps ?
Peu importe à vrai dire. Parfois on ne demande qu'à croire, ne serait-ce que momentanément, que telle ou telle chose bizarre soit vraie. Alors si c'est présenté d'une façon simple et réaliste, qu'il n'y a ni excès ni manque et qu'on apprend des choses nouvelles, c'est que nous ne demandons rien de plus !

9/10

Tuesday, December 17, 2013

Bastardo

Bastardo (Nejib Belkadhi, 2013, Tunisie/France)


Mohsen, alias Bastardo, est renvoyé de son travail, chose qui complique davantage sa vie dans un quartier où tout le monde le regarde de haut. Mais l'installation d'un relais GSM sur son toit va tout changer.

Beaucoup de films tunisiens utilisent les métaphores à tort et à travers et ce, tout en essayant de parler de "problèmes de la société tunisienne". On en arrive au point à se demander si cette société dont ils parlent ne se situerait pas sur une autre planète, d'autant que les raisons qui poussent les "film-makers" à se ruer sur ces problématiques demeurent un mystère.
On a soit ce type, soit les comédies légères à en perdre la raison.
C'est très réducteur, et je ne prétends pas posséder un savoir énorme sur le cinéma tunisien, mais ce sont justement ces films pourris qui me découragent à en découvrir plus.
Mais il arrive, de temps en temps, qu'un film sorte du lot et sans pour autant être exceptionnel. Bastardo est en ce sens un bâtard du cinéma tunisien. Un style assez particulier qui frôle le surréalisme tout en gardant les pieds solidement ancrés sur terre.

J'avoue que je m'attendais à quelque chose de différent et même de mieux, mais j'étais surpris, en même temps, par l'univers créé par Nejib Belkadhi, ce côté légèrement en dehors du naturel tout en restant loin des prétentions fallacieuses d'un Dowaha, juste en tant qu'exemple. Ca fait quand même un bon bout de temps qu'on entend parler de Bastardo et personnellement je pensais qu'il allait prendre un chemin différent, plus direct et plus violent.

Le film tourne autour du crime mais il ne s'agit que de la forme, le fond étant axé sur d'autres notions qui laissent le terrain libre pour le crime, la violence et la pauvreté de fleurir. C'est à la fois la force et la faiblesse de Bastardo. Dans cet univers où la police n'existe pas, où une fille attire d'une façon répugnante la vie envers elle, les allégories constituent l'essence même de l'oeuvre.
Mais si on veut nous faire entrer dans un monde nouveau, il faut d'abord nous montrer la voie. Les éléments qui constituent ce monde sont généralement bien dressés mais on sent toujours un vide, un détail qui manque. Pourquoi X se comporte-t-il avec Y de cette façon ? Non, les mini-flashbacks assez présents ne sont pas suffisants, d'autant qu'ils ne sont pas vraiment efficaces.
On nous parle du changement de l'état du quartier à plusieurs reprises mais sans pour autant nous montrer réellement ce changement. De même pour les personnages qui donnent l'impression de subir des transformations importantes sans qu'on ne puisse associer correctement la cause à la conséquence.

Il faut tout de même reconnaître que malgré sa courte durée et le manque visible de temps consacré au personnages, l'expérience est plutôt plaisante et l'immersion agréable. L'esthétique bien soignée joue un rôle important à dépeindre l'ascension au pouvoir d'un bâtard détesté par tous. Et même si les caricatures sont parfois exagérées plus qu'il ne le faut, Bastardo arrive à nous redonner l'espoir, à nous faire comprendre qu'il est tout à fait possible d'expérimenter sans pour autant que cela ne vire à la masturbation gratuite.

7.5/10