Friday, February 26, 2016

Chappie

Chappie (Neill Blomkamp, 2015, USA/Méxique)


2016, la ville de Johannesburg est infestée par le crime violent. Une entreprise a trouvé une solution en mettant en place des robots-policiers très efficaces dans la réduction du taux de criminalité. L'un de ces robots est doté d'une intelligence artificielle qui lui permet d'avoir une conscience, mais il est volé par un petit groupe de criminels.

Neill Blomkamp a commencé fort avec son premier long-métrage District 9, mais il a fait une chute avec le très décevant Elysium. Avec Chappie je me suis dit qu'il était temps de se reprendre, qu'Elysium n'était qu'une erreur involontaire. Après tout, son premier court-métrage Tetra Vaal, sur lequel est basé Chappie, était prometteur, et l'idée, si elle est bien exploitée, pourrait donner une merveille. Mais le réalisateur a choisi de prendre d'autres chemins moins ambitieux.

Le début laisse présager un retour vers un style un peu plus proche de District 9. Quelques minutes plus tard cette sensation commence à s'ébranler, et la première scène d'action commence. C'est du beau spectacle. Il y a des balles tirées partout, des choses qui explosent, et au milieu de tout ce chaos les robocops sont occupés à butter du cul de méchant. C'est jouissif même si on commence à remarquer certaines choses illogiques, mais on se dit qu'en fin de compte ça va être un film d'action où la raison et la logique n'ont pas d'importance face au plaisir de voir des explosions et du sang qui coule.

Mais au fur et à mesure qu'on avance on comprend que l'action n'est pas la priorité principale. L'idée est de montrer comment un robot "conscient" commencerait à mener sa nouvelle vie dans un monde brutal. Tout est donc bon pour le mettre dans différentes situations où on pourrait le voir apprendre à parler, s'adapter, utiliser le langage des gangsters ou encore effrayer les gens. Sauf que tout cela n'est pas assez excitant aux yeux de Blomkamp, il faut introduire des éléments démoralisants, des obstacles et des limites vraisemblement infranchissables, pour nous rattacher de force à Chappie le robot tout en pensant qu'il n'a aucune chance de s'en sortir. Et donc l'histoire avance bêtement en nous imposant à chaque fois la nouvelle étape à franchir, le prochain but, sans aucune considération pour le bon sens. Un personnage X annonce qu'il faut faire ceci ou cela et c'est ce qui se passe. Ensuite, un autre personnage Y dit que cette chose ou l'autre est très importante, et donc tout les événements du film tournent autour de ça pendant un moment, jusqu'à la prochaine étape. Et là ça reprend, peu importe si l'explication qu'on nous donne est convaincante ou pas, et généralement elle ne l'est pas. Mais il faut que le film continue d'avancer, il n'y a pas de temps à perdre à essayer d'expliquer comment telle ou telle chose pourrait se passer de cette façon, il y a d'autres méchants à montrer, et les méchants furieux qui veulent tout casser à tout prix sont nombreux.

À la fin on comprend que le film n'est qu'une longue série d'excuses pour nous montrer un combat à la Robocop, tout en jouant sur le sensationnel avec un robot plus humain que machine pour en arriver là. Sauf que là encore ce n'était pas suffisant pour Blomkamp. Il lui faut rajouter quelque chose d'encore plus touchant, quelque chose de "profond" pour appaiser le public. Après tous ces morts et toute cette destruction, il faut que le spectateur sort avec une image positive et joyeuse. Et pour cela il faut des clichés, et il vaut inventer un nouveau concept à résoudre dans la dernière partie du film. Peu importe le comment, peu importe la balle qui disparaît miraculeusement de la jambe de quelqu'un sans aucune explication, peu importe qui est mort et qui ne l'est pas ; il suffit de montrer quelques images et c'est suffisant, les maux disparaissent, et la musique va s'soccuper du reste.

Ma déception est assez énorme, quoique le film reste beau à voir avec des scènes d'action excellentes. C'est amusant aussi avec tout ce que fait un robot nouveau-né dans le monde des gangsters. Mais cette envie d'inclure le nombre le plus élevé possible de clichés (et de méchants aussi) aux dépens de l'histoire finit par le réduire à un simple film avec lequel on pourrait passer une bonne soirée et à oublier le lendemain.
Avec un film réussi et deux de suite ratés, je suis préoccupé pour le prochain Alien qui sera réalisé par Neill Blomkamp.

04/10